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les mots de MEL
12 mars 2008

PAPA

papa

Mes yeux ont trébuché sur ce bout de photo sorti de son contexte: ton mariage. Je ne voulais que toi; ni la femme, ni l'enfant; juste ma peine nue. Je suis frappée par la beauté dure et fantomatique de ce visage, il me fait un peu peur. Ce jeune homme n'est plus du monde des vivants, ses yeux sont déjà morts, ils me glacent le sang. Je sais que c'est le découpage, l'image vieillie, la mauvaise qualité de l'agrandissement, ce corps qui, privé de celle qui l'accompagne, semble en déséquilibre, prêt à tomber dans le néant qui l'emportera plus tard. J'ai toujours pensé qu'il savait; il vivait dans l'urgence, avec un goût excessif de l'absolu et de la perfection que j'ai tant déçu, ingrate petite fille...

Il m'aimait, maladroitement, de façon irrationnelle et tyrannique; il m'aimait avec indécence, sans aucune pudeur et sans concession. Il m'étouffait, souvent, il m'écrasait, parfois, me voulait à son image et recommençait le brouillon à m'en briser l'âme. Mais il m'aimait si fort que son absence a envahi ma vie et qu'il m'a fallu attendre d'avoir eu son âge et même plus pour pouvoir coucher des mots sur ma souffrance.Parfois, le temps me donne l'illusion que la plaie est cicatrisée, et un petit bout de papier l'ouvre aussi profondément que les éclats de verre qui se sont fiché dedans autrefois...

Je serai peut-être guérie quand je l'aurai montrée, cette plaie, autrement qu'avec mon visage.

J'ai hérité de sa foutue émotivité et je ne sais aimer qu'avec l'excès de la passion. J'essaie juste de n'emporter que moi, dans ce tourbillon qui m'enivre souvent, me blessant sur les parois rugueuses de la réalité.

Pas d'enfant unique dans ma maison, j'en aurais voulu dans toutes les pièces vides que tu as laissé en moi, mais  je les aient déjà bien remplies...

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Commentaires
E
Deux syllabes acollées... à l'infini répétées. Premiers sons de l'enfant qui balbutie, fierté de ce papapapa qui est nommé et reconnu, de fait. On sent cet amour perceptible dans ce "papa" que tu aurais pu nommer "mon père" mais qui alors aurait pris un sens bien différent.
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C
Merci à tous pour votre passage, ne m'en voulez pas de rester silencieuse ici et chez vous, mais je suis dans une période difficile et je n'en vois pas la fin.
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A
pour tes passages silencieux ou attendris.<br /> Il fallait que justement tu parles de ton père.<br /> Moi, j'aime le mien avec passion et je suis morte de trouille à l'idée qu'il puisse partir...sans moi!<br /> Il va bien....pour cette fois encore.<br /> Le tien était très beau et tes mots pour le décrire sont comme "cousus" sur mesure...à la mesure de tes sentiments!<br /> Je t'embrasse<br /> Any
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S
J'aime quand l'émotion est forte...
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B
Lignes intenses, émouvantes, vibrantes, chargées de souffrances aussi... eu des frissons à te lire ce soir...
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les mots de MEL
  • "De deux choses Lune, l'Autre c'est le Soleil." JACQUES PREVERT. Amoureuse des mots, ne peux vivre pleinement qu'au travers de ceux-ci, qu'ils soient littérature, théâtre, cinéma, réels, imaginaires, pourvu qu'ils fassent vibrer l'âme et la nourrissent.
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